• Alors qui es-tu ?
Je suis Yoël, étudiant en Lettres à la Sorbonne le jour, et prof d’hébreu à l’Oulpan Lavi la nuit (ou plutôt le soir). Je suis né en Israël de parents immigrés de France, ce qui fait que j’ai toujours été bilingue. Depuis tout petit je trouvais grand intérêt dans les langues, ce qui les sépare et ce qui les rapproche, leurs affinités et leurs caractères singuliers, et je continue toujours d’explorer ce sujet fascinant, à la fac et dans mes classes d’hébreu.
• T’as un passion ? un hobbie ?
La littérature et l’apprentissage des langues a toujours été mon seul vrai hobbie, et j’y consacre une bonne partie de ma journée et de ma vie. Après, je m’intéresse aussi aux arts plastiques et à la musique, ou encore, à la cuisine, à l’architecture, au cinéma etc – mais ce sont des relations beaucoup moins exigeantes.
• Depuis quand es-tu prof d’hébreu à l’Oulpan lavi ?
A la rentrée ça serai ma deuxième année
• Le truc le plus compliqué à enseigner en hébreu ?
Je pense que la chose la plus compliquée à enseigner pour des francophones est la notion de la racine : trois (ou plus) consonnes qui viennent dans différents schémas de voyelles, qui ont un sens commun et qui peuvent former aussi bien des verbes que des substantifs. Non seulement la compréhension du concept « grammatical » est très étrange pour un locuteur d’une langue indo-européenne, mais même pour l’entendre à l’oreille il faut faire grand effort. Mais bon, on finit toujours par le maîtriser !
• Une anecdote que tu racontes à tes élèves ?
Grandir dans un foyer bilingue peut créer toutes sortes de chimères qui peuvent être bien drôles : chez mes parents, par exemple, on trouvera toujours dans le frigidaire du « fromage jaune » – un calque de l’hébreu « גבינה צהובה », qui est le fromage le plus populaire en Israël. Pour un français, ça ne veut absolument rien dire, bien sûr. Mais dans notre language à nous – car on peut changer de langue trois fois dans une phrase – c’est tout à fait élémentaire.
• Ton expression préférée en hébreu ?
Oh, il y en a plein !
La première qui me vient à l’esprit est un verset des Psaumes :
« אֶבֶן מָאֲסוּ הַבּוֹנִים הָיְתָה לְרֹאשׁ פִּנָּה ».
Louis Segond l’a traduit par « La pierre qu’ont rejetée ceux qui bâtissaient est devenue la principale de l’angle ». Il y a beaucoup d’allusion à ce verset dans la littérature et dans la culture (par exemple la ville Rosh Pina), et il m’est très cher.
• Un aliment, un plat ou une odeur qui t’évoque Israël
Je ne suis pas du tout du genre nostalgique, donc je ne pense pas avoir un aliment spécial qui m’évoquerait particulièrement Israël.
Bien sûr, il y a des plats qu’on mange plus souvent là-bas qu’ici : le houmous est l’exemple type ; mais la double culture est présente ici aussi : quand je vivais en Israël, le goût d’un vrai croissant au beurre m’évoquait la France et me faisait rêver à cette patrie de mes parents, patrie qui n’en est pas une. Donc, c’est compliqué.
• Un endroit particulier pour toi en Israël que tu conseillerais à nos élèves.
Il y en a plusieurs ; J’en citerai deux :
le premier est un endroit magnifique dans le Golan, נטור au nord du pays, où j’ai passé une des années les plus merveilleuses de ma vie, juste après le lycée. C’était une plaine à perte de vue. Au loin on voyait la kineret, la mer de Galilée, et derrière elle, à l’horizon, des montagnes bleuâtres qui changeaient d’allure tous les jours. On y vivait dans des caravanes, mangeait sous la belle étoile, et si vous voulez, nous récitions des vers en oubliant l’hiver. (Là je suis bien nostalgique, par contre.)
Le deuxième est ce point à Yaffo d’où l’on voit d’un coté les plages de Tel aviv et ses gratte-ciels, et d’un autre, les mosquées de Yaffo au sommet d’une petite colline pittoresque. Y rester pendant qu’on voit le soleil qui disparaît dans la mer est un vrai moment de grâce.
Merci Yoël, ce n’est pas juste un plaisir de t’avoir avec nous à l’oulpan, c’est une richesse. J’avoue avoir (re)découvert l’hébreu avec toi…
PS: Si vous souhaitez connaître les autres profs d’hébreu et membres de l’oulpan lavi, c’est ici :